Le quintette québécois Karkwa récidive ces jours-ci avec Les chemins de verre, un quatrième album fort attendu. En effet, après avoir été maintes fois décoré par l'ADISQ en 2008 et 2009 (Groupe de l'année, Auteur ou compositeur de l'année, Album alternatif de l'année, Clip de l'année, et j'en passe), il est évident ici que la barre est haute. Plutôt que de privilégier une musique somme toute traditionnelle aux forts accents identitaires comme Mes Aïeux ou Les Cowboys Fringants, par exemple, Karkwa continue d'explorer des avenues similaires à Malajube, Dumas ou, un temps, à Projet Orange ou même Daniel Bélanger: un folk-rock ouvert sur le monde à la production aventureuse et atypique.

Les détracteurs qui accusent Karkwa d'émuler trop fidèlement ses modèles trouveront de nouvelles munitions ici dès le premier morceau intitulé Le pyromane, qui n'est pas rappeler The Bends de Radiohead (une comparaison encore une fois inévitable, surtout sur 28 jours et ses sautes d'humeur stylistiques). Par contre, on diversifie également ses influences, alors que la chanson titre et Marie tu pleures évoquent sans embâcle ou honte les harmonies vocales périlleuses des Fleet Foxes.

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On sent partout sur cet album le désir d'innover, et Le bon sens et La Piqûre étonnent à cet égard par leur surprenante rythmique, à la fois écrasante et martiale, et la tension qui se dégage des arrangements. Les enfants de Beyrouth et Au-dessus de la tête de Lilijune poursuivent dans la même veine exploratoire, mais en donnant encore plus ici dans l'abstraction impressionniste, ce qui entraîne, au final, en deux morceaux de bravoure et d'audace. Le tout se termine avec les quelques notes de piano épars sur Le vrai bonheur, une conclusion atmosphérique parfaite dont le titre synthétise à lui seul l'entreprise de Karkwa. Les chemins de verre est un album à la fois profondément authentique et triomphant.

Par Stéphane Girard, le 30 mars 2010